Je présente mes travaux de sculpture, peinture, gravure comme ayant un support direct avec notre région lorraine autant par leur thème que l’emprunt de matières aussi diverses que le bois, l’acier, le bronze, le cristal, la toile, le papier. Les mutations industrielles et technologiques ont modelé le paysage autour de la Meurthe et la Moselle. Le site de la confluence a fortement influencé mes travaux et est devenu ce que j’appelle communément mon territoire. La mémoire des activités qui ont été le théâtre historique de ce lieu où les rivières se rencontrent pour mêler industrie et culture prend valeur de symbole créatif et d’ouverture artistique. A la mesure de ces faits mes sculptures issues d’usines métallurgiques jalonnent le paysage. Marqués par l’ampleur des ressources de transformation que l’on possède, mes travaux ne se figent pas. Ces dernières années, peintures, gravures, installations intériorisent couleurs et fluidité mimétique, élargies aux paysages pluriels.

Il fait ses études artistiques à l’École nationale supérieure d’art de Nancy dans l’atelier de gravure d’André Vahl. Il obtient le Diplôme National d’Arts Plastiques, la qualité de ses travaux le faisant, très tôt, apprécier par ses pairs : ainsi, dès 1979, la force, l’originalité et la liberté de ses eaux-fortes lui valent l’approbation chaleureuse du maître André Jacquemin. Quant à l’Académie de Stanislas qui l’a honoré, en 1970, du prix Quintard, elle confirme son choix en 1980 en lui attribuant le prix Galilée : aussi participe-t-il, en compagnie des meilleurs artistes lorrains, comme lui lauréats de ce prix, à la grande exposition de 1989 aux galeries Poirel puis en 1992, à l’hommage à Jacques Callot, modèle de tous les graveurs.

Nommé professeur de gravure à l’École supérieure d’art de Metz en 1982, il y forme un grand nombre de disciples tout en produisant une œuvre personnelle très importante et très diversifiée, puisque s’y rassemblent dessins, gravures, peintures, sculptures, installations et objets divers. Son inventivité, son habileté, son opiniâtreté, son goût pour le monumental, voire la démesure, s’accompagnent d’une curiosité gourmande qui lui fait mettre en place toutes les techniques et tous les matériaux, même les plus insolites, papier, carton, feutre, velours, bois, fonte, acier, cristal, pierre, polyester et oser, entre eux, d’étonnantes confrontations.

C’est ainsi qu’en 1986 il grave au chalumeau décriqueur, à l’usine de Pompey, douze lingots d’acier pesant chacun plus de quatre tonnes : déposés le long de la Moselle, ces « Gueules d’enfer » constituent un hymne à la sidérurgie lorraine et un puissant hommage au labeur des hommes. En 2003, ce doux colosse présente dans le cloître canonial de la cathédrale de Saint-Dié-des-Vosges une installation — boules de tissus cousues et façonnées en confrontation à des roches de grès et de granit, immenses toiles peintes — où il se montre tout à la fois peintre, graveur, sculpteur et scénographe. Plus récemment encore, il proposait ses créations originales et fortes au festival du vent des Forêts et au musée du Fer à Jarville.

Depuis quatre décennies, Jean-François Chevalier, qui a participé avec des succès flatteurs à de multiples expositions individuelles ou collectives et dont plusieurs œuvres importantes figurent dans des collections publiques, a ainsi créé des recueils de gravures, des stèles-tabernacles, des installations poétiques, des lieux de mémoire et d’émotion.

Henry Claude, février 2007