Dédoublement, Jean François Chevalier

DÉDOUBLEMENT- DES DOUBLEMENTS

Double sens. Pluralité de points de vue. Opposition. Le dédoublement donne le ton de l’exposition.  Le fait d’ajouter à ce qui se peint, une autre couleur, un autre volume ou un objet, donne à l’œuvre une approche pour un regard.

DEDOUBLEMENT

Je me souviens du jour où j’ai découvert dans les Vosges, à Barbey Serroux, cette moraine glacière : le champ de roches comme la nomme les paysans locaux. De suite, j’ai pensé que cela remontait aux origines, qu’il n’y avait rien depuis toujours et qu’il n’y aurait rien dans le futur que ces boules de granit recouvertes de lichen. Alors pourquoi ne pas en imaginer d’autres, transportables dans les expos, pour dédoubler le paysage ? C’est un critère très important pour moi de ne jamais préméditer quelque chose. Il n’y a pas de stratégie. Les chose arrivent avec le temps.

Parlons maintenant de l’origine.

Cette peinture s’inscrit dans la suite de la multitude d’aquarelles que j’ai faites il y a quelques années, où le geste était très important et prenait l’ampleur de la surface. Ces aquarelles ont d’ailleurs servi pour habiller la voiture de Xavier à l’occasion de sa performance « Piloter une aquarelle ». Alors que je peignais sur une toile à la dimension d’un lit, il s’est passé quelque chose de complètement inattendu : j’obtenais des couleurs qui correspondait tout à fait à un souvenir de rideau en perles de bois qui séparait l’appartement de mes parents de leur magasin. J’ai ressorti ce rideau de ma caverne d’Ali Baba. Je n’ai rien changé à la toile et l’ai suspendu devant. L’origine de Courbet. Bien entendu. Comme chez mes parents, ce rideau servait à séparer le public du privé. Cette réponse me suffit .

Lierre

Cette toile intitulée lierre, je l’ai faite presque sans m’en rendre compte en prélevant une liane de lierre sur le mur de mon atelier. Là aussi, c’est une empreinte de la nature. J’ai pris cet élément qui m’était familier comme point de départ et j’ai suivi le cheminement qui s’opère du visible à l’allusion. L’arbre de Courbet, le chêne, les rochers de la Loue,Turner, tous ces gens là…Et tout s’enchaine admirablement.

La peinture devient paysage.

Le fait de peindre un morceau de bois, de le projeter sur ces deux toiles les transcende. Les toiles sont traversées par l’idée, la pensée et deviennent dédoublement .

Caillebotis

On est en plein été, la canicule nous accable. On ferme les jalousies. Elles s’associent dans mon esprit à des caillebotis. Cet objet est suffisamment méconnaissable, graphique, que l’on peut le multiplier tout à loisir. C’est cela qui m’a intéressé.

Grand papier

Avec le temps, il y’a un espèce d’humus entre les choses. Des couches de sédimentations, les choses ne sont pas figées, elles peuvent devenir autre chose . Ce grand papier est la trace d’un cheminement, une rencontre de découpes de quelque chose qui s’est fait, s’est dévoilé comme une macule. Un corps absent qui aurait laissé des traces, un palimpseste d’une chose qui se serait passée en ce lieu.

Fixé sous verre

Le fixé sous verre dédouble des formes et les mêlent au regard comme ces gravures où les formes semblent être des formes qui vont disparaître.

Assemblages

Dans ces derniers assemblages, j’ai, pour la plupart, utilisé la gravure comme fond et j’y ai associé des chutes de papier, des morceaux de cuir et autres…pour les dédoubler et construire de nouveaux objets. Ce travail est en cours. Va t’il aboutir ?

C’est à Baudelaire que reviendra ma conclusion. « L’artiste n’est artiste qu’à la condition d’être double »